Le schéma

1.2 La correspondance schématique

a) Certains signes ou symboles du schéma correspondent à certains objets extérieurs au schéma, objets que le schéma a précisément pour mission de représenter. Dans certains cas, ces symboles sont eux-mêmes des objets concrets, plus simplement ou plus facilement maniables que les objets «extérieurs».

Nous appellerons signification extérieure du schéma la réalité qu'il a pour fonction de saisir, en la schématisant.

b) Certaines relations qui existent par avance entre les symboles ou qu'on y porte plus ou moins conventionnellement répondent à certaines relations à désigner, à distinguer, ou à imaginer, entre les objets extérieurs.

Ainsi la relation «d'être reliés par un trait rouge», valable pour certaines paires de points de notre carte, a pour signification extérieure la relation «d'être éloignés de moins qu'un diamètre de la boule», valable pour certaines paires d'arbres de la forêt.

c) Certaines opérations (raisonnements ou manipulations) exécutables sur le schéma en tenant compte uniquement de sa nature propre ou des propriétés qu'on lui a conventionnellement conférées (et par conséquent sans avoir à se référer aux significations extérieures) sont en correspondance directe avec certaines opérations exécutables dans la réalité visée par la schématisation, de façon que les unes puissent être prises pour les autres, comme le symbole peut être pris pour le symbolisé.

Les trois points a), b) et c) sont relatifs au côté positif, au côté efficace de la concordance schématique. Le troisième est d'une importance toute spéciale. Il peut même arriver que la concordance dont il y est question porte beaucoup plus loin qu'on ne l'avait tout d'abord prévu.

Il faut cependant se garder de n'apercevoir le schéma que sous cet angle favorable. Rien ne nous assure que toute opération, tout raisonnement, toute connaissance dont le schéma peut être l'objet doive inévitablement trouver une interprétation valable, doive posséder une signification extérieure. Un raisonnement fait sur le schéma n'engage le schématisé que si chacune des démarches qu'il comporte peut être adéquatement transposée.

Supposons, par exemple, qu'un trait XY de notre carte soit visiblement plus court qu'un trait rouge X'Y'. Ce fait ne permet pas de conclure que le premier des deux traits est rouge aussi, car il n'est pas du tout certain qu'en confectionnant notre carte nous ayons respecté les rapports des distances des arbres entre eux. Le procédé indiqué dans la fable ne l'exige pas.

En revanche, le raisonnement que voici est légitime : si T est situé à l'intérieur d'un triangle XYY', dont les deux côtés XY et XY' sont des segments rouges, le segment XT est rouge lui aussi.

En résumé, et en principe, la portée d'un raisonnement ou d'une manipulation auxquels le schéma se prête n'est pas illimitée. Il ne faut pas espérer que le schéma puisse rester valable pour tout nouvel usage qu'on en voudrait faire. Il peut arriver qu'il reste valable dans telles ou telles circonstances qui n'avaient pas été prévues au moment où il fut établi, mais l'éventualité contraire est elle aussi possible.

d) Un quatrième caractère du schéma est d'être, en principe, révisable.

Une fois la carte terminée, tout retour à la forêt est superflu, si ce n'est pour passer à la réalisation de la solution. Il serait tout particulièrement ridicule de revenir à la boule pour la pousser en tous sens à travers les arbres, en se fiant à un heureux hasard. Une telle conduite reviendrait à changer d'intention sans motif et annulerait tous les résultats acquis jusque-là. Cette conduite incohérente prendra tout à l'heure figure d'erreur de méthode.

Mais si nos intentions variaient, si la carte devait, après coup, servir encore à d'autres fins, si elle devait nous permettre d'accomplir encore d'autres tâches, un retour à la forêt pourrait devenir légitime et même nécessaire. Il se pourrait que pour ces nouvelles tâches, notre carte fût encore incomplète. Peut-être n'y avons-nous pas encore porté, à l'aide des symboles convenables, certaines indications indispensables. Si la forêt contenait des érables à sucre, par exemple, et que nous eussions à en tenir compte, nous ne pourrions nous dispenser d'aller les reconnaître pour affecter les points qui leur correspondent d'un signe adéquat. Notre schéma se trouverait alors révisé et complété.

Ce dernier exemple est cependant un peu trop simple. Cette trop grande simplicité est de nature à nous suggérer une conception erronée, une conception assez naïvement réaliste, des rapports du schéma à sa signification extérieure, conception dont il nous faudra nous garder. Aussi va-t-il falloir pousser notre analyse encore d'un bon pas plus loin.

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Mise à jour : 2005-09-20