Parallèle aux autres grandes découvertes de la physique moderne, née sous
l'impulsion de von Neumann, Shannon, Brillouin, et de bien d'autres, la théorie
de l'information occupe une place à part dans le paysage scientifique. Le fait
que l'information, malgré son caractère abstrait, soit évaluable quantitativement,
apparaît naturel au technicien des télécommunications. Mais la démarche
scientifique elle-même, la mesure, la modélisation, sont des actes informationnels.
Aussi la science de l'information se situe-t-elle nécessairement, tout comme les
mathématiques, au niveau des fondements des autres domaines scientifiques.
Les études scientifiques que je terminais en tant qu'étudiant en physique
m'avaient laissé sur ma faim, m'offrant une vision éclatée du monde faite d'une
multitude de modèles, d'hypothèses, de schémas (et de lacunes) juxtaposés les uns
aux autres, et parfois contradictoires. Quand je pris connaissance de la théorie
de l'information à travers la synthèse qu'en faisait l'ouvrage Information,
Thermodynamique, Vie et Pensée, je sus que je tenais là une piste radicalement
nouvelle pour découvrir et comprendre les concepts fondateurs que je cherchais
presque inconsciemment. N'était-il pas plus gratifiant, plutôt que de disséquer
les détails de la microphysique, de travailler sur des notions synthétiques et
unificatrices ? – Je m'orientai donc définitivement dans la voie ouverte par
François Bonsack, à qui je dois toute ma reconnaissance pour avoir initié en
pionnier cette réflexion fondatrice.
[Gérard Pinson, agrégé de Sciences Physiques, chercheur au laboratoire CEDRIC, CNAM, Paris]